Interview~ Alain de “De Noodcentrale” (Le Centre d'appels urgents)

Centrale d'urgence 112
Notre personnel
"Si vous vous faites attaquer et que vous ne pouvez donner plus qu’une seule réponse, SVP, faites en sorte que cela soit votre adresse."
Alain CIC Anvers

Photo : © VRT

Tu as déjà eu plusieurs jobs au sein de l’Intérieur mais c’est pour le centre d’appels urgents que tu travailles depuis le plus longtemps. Pourquoi à ton avis ?

Ici, au sein du centre d’appels urgents, j’aide vraiment les gens, ce qui fait que je me sens plus utile. A titre d’exemple: à un moment donné, nous recevons un appel d’une personne qui se trouve sur un pont et qui veut se jeter dans le vide. Deux minutes plus tard, des agents de police sont arrivés sur les lieux et ont réussi à faire descendre la personne du parapet. A ce moment-là, j’ai vraiment contribué à sauver une vie humaine et cela me procure une grande satisfaction. En tant que gestionnaire de dossiers, je n’ai jamais eu de liens émotionnels avec mes dossiers. Au niveau du centre d’appels urgents, je veux que toute intervention se termine bien et je suis davantage concerné par ce que je fais parce que je peux vraiment faire la différence. C’est ce qui rend ce job aussi passionnant.

N’est-ce dès lors pas difficile de garder ses distances ?

En général, j’oublie tout immédiatement. Dans ce cas, je suis par exemple heureux pendant deux minutes parce que j’ai réussi à faire la différence lors d’un appel urgent aussi crucial. Ou alors je suis de mauvaise humeur pendant deux minutes parce qu’une personne m’a « engueulé comme du poisson pourri ». Mais cette émotion doit disparaitre car l’appel suivant n’est pas loin. Si toute une série d’appels négatifs nous parviennent, je dois veiller à ne pas me laisser entraîner dans cette spirale afin que mes réponses ne deviennent pas elles aussi très sèches.

Comment gères-tu les appels difficiles ?

Cela semble peut-être étrange, mais nous rions beaucoup. Et il le faut, nous devons avoir de l’humour. Souvent nous nous disons: “si les gens entendaient cela, ils ne comprendraient pas que ces situations nous font rire”, mais nous devons à tout prix éliminer cette pression d’une manière ou d’une autre. En fait, c’est de cette manière que nous éliminons notre douleur après un appel vraiment difficile. Le fait de rire est donc une sorte d’exutoire.

Qu’est-ce qui vous semblait le plus difficile lorsque vous avez commencé ce job ?

Au début, je faisais preuve de trop d’empathie. En moyenne, nous répondons à une centaine d’appels par shift. Le fait de se laisser entraîner de manière émotionnelle par chacun des appels nous coûte trop de temps et d’énergie. J’ai donc vraiment dû apprendre à traiter les appels de manière plus rapide. En tant que calltaker, il est important de rester professionnel et de garder le contrôle de la conversation, ce qui fait que parfois nous semblons être très durs. J’aimerais écouter votre histoire, mais je veux d’abord savoir où vous êtes afin que je puisse vous envoyer les services de secours. Il est évident que j’aimerais également savoir ce qui se passe. Si une fusillade a lieu, je tiens à en être au courant à l’avance de sorte que la police puisse intervenir  de manière appropriée. Cependant, ma première question sera toujours la même: “Puis-je d’abord savoir pourquoi vous avez besoin de la police?” De ce fait, la plupart des personnes sont désorientées et vous donnent immédiatement leur adresse. Si vous laissez les gens vous raconter d’abord leur histoire, cela devient difficile de les interrompre, ce qui fait que vous perdez un temps précieux. Si vous vous faites attaquer et que vous ne pouvez donner plus qu’une seule réponse, SVP, faites en sorte que cela soit votre adresse.

Pourquoi avoir collaboré au programme télévisé?

Nous avions deux messages à faire passer auprès des téléspectateurs. Premièrement, il ne faut pas téléphoner au centre d’appels urgents pour des bêtises, car ce n’est pas notre travail de répondre à ce genre de questions. Nous ne sommes pas un helpdesk. Le terme “urgents” dans “centre d’appels urgents” est crucial. Les gens se font une image erronée de ce que nous faisons ici et pensent que le numéro 101 est un point de contact pour la police ; mais si vous n’avez pas besoin d’une aide urgente, vous ne devez pas nous appeler. Lorsque vous partez en vacances, vous consacrez beaucoup de temps et d’efforts pour rechercher le vol le moins cher. Pour chercher l’agent de quartier, il suffit de surfer sur le site web de la police. Pourtant, nous recevons souvent des appels à ce sujet,  ce qui est très frustrant. Qui sait si, au moment où nous répondons à ce genre de questions, il n’y pas une personne qui a vraiment besoin de notre aide et que nous ne pouvons donc pas l’aider. Deuxièmement, il y a une pénurie de calltakers. Si, grâce à ce programme,
des personnes sont intéressées par ce travail, pour nous c’est une double réussite.

Le conseil d’Alain

Pour les nouveaux calltakers : l’expérience est très importante dans ce métier, et cette expérience ne s’acquiert pas en deux mois de formation. Il faut donc s’armer de patience et se donner le temps d’apprendre ce métier. Il ne faut pas croire trop rapidement que vous y êtes parvenu, mais il ne faut pas désespérer trop vite en se disant qu’on n’y arrivera pas. En réalité, ce n’est qu’après un an que l’on sait si ce job est fait pour vous. J’ai connu des gens ici qui avaient vraiment du mal à s’adapter mais qui, après la première année, ont eu un déclic qui les a mis sur le bon chemin. Il faut faire beaucoup de choses en même temps et prendre des décisions en quelques secondes et ce uniquement sur la base de ce que l’on vous dit. En d’autres termes, il ne faut pas sous-estimer ce job. Il est évident que vos collègues peuvent vous aider et il ne faut donc pas avoir peur de poser des questions. Moi-même je le fais encore à l’heure actuelle. Tout le monde aide tout le monde.

Alain travaille depuis six ans déjà comme calltaker du Service public fédéral Intérieur au sein du centre de communications et d’information (CIC101) de la police. Il est l’un des filmés dans le programme télévisé « De Noodcentrale », jusqu’au 26 avril, chaque mardi à 20h35 sur la Eén. A ne surtout pas rater !

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